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Laure Debreuil

La justice : un domaine complexe ; elle a un endroit et parfois un envers…façon de dire que l’on peut parfois parler de justice autrement et raconter ce que l’on ne peut pas voir à la télévision. Les caméras sont rarement les bienvenues dans les prétoires. C’est parfois frustrant. Voila pourquoi, par ces chroniques, je souhaite restituer l’atmosphère, les informations ou les à-côtés des procès que je suis pour la rédaction de TF1.

 

 

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20 juin 2011 1 20 /06 /juin /2011 12:35

Curieuse ambiance dans la salle de la cour d’assises ce matin. Plus une place  sur les bancs du public ou de la presse. La jeune épouse d’Yvan Colonna est assise au deuxième rang. Visage en amande, longs cheveux noirs, elle guette l’entrée de son mari. Yvan Colonna apparaît, souriant, en T-shirt blanc à manches longues. Il lui fait un signe de la main et un grand sourire.

A 10h15, il fait déjà très chaud lorsque la cour « spécialement composée », c'est-à-dire composée uniquement de magistrats professionnels, rend son arrêt sur le sujet de savoir si de nouvelles questions pouvaient être introduites en plus de celle prévues en conclusion de l’ordonnance de mise en accusation. Les avocats de la défense voulaient que la cour dise précisément si les déclarations des membres du commando et de leurs épouses constituent des preuves probantes ou non. Demande rejetée.

10h30, l’heure des derniers mots pour Yvan Colonna.

« J’ai le temps ? » dit-il en regardant le président. La voix est nouée par l’émotion. Puis il se lance :

« Je vous dirai qu’en 99 ma vie a basculé. Je me suis retrouvé dans une situation très difficile. Je ne peux pas expliquer pourquoi j’ai pris du recul. C’est un non-choix, pas un choix politique. Je me suis fait arrêter. J’en suis à huit ans de prison pour un crime que je n’ai pas commis. Ces huit ans m’ont profondément changé, vis-à-vis de ma famille, de mes proches ; ma mère, cela fait cinq ans que je ne l’ai pas vue. Mon fils, qui est dans la salle, cela fait sept mois que je l’ai pas vu. Je ne lui en veux pas. La prison, cela détruit les rapports humains.

"Dans quelques minutes, vous allez vous retirer pour délibérer. Comme mes avocats, j’ai peur moi aussi ; je n’ai jamais eu aussi peur de ma vie.

"Je suis innocent, je l’ai toujours dit depuis 12 ans. J’ai des convictions, cela ne fait pas de moi un assassin. Vous savez ce qu’était ma vie avant la prison. Cela prouve que j’ai toujours eu le respect de la vie. Quand j’étais militant et que deux trafiquants de drogue ont été assassinés, je n’étais pas d’accord. J’ai toujours eu cette conduite-là. J’étais pompier, j’ai sauvé des gens. J’étais l’été maitre nageur, j’ai sauvé des gens. Les policiers sont arrivés à faire de moi un coupable. Je n’ai jamais tué, ni même imaginé tuer quelqu’un. Je n’ai pas fait ça ; ce n’est pas moi, les gens qui me connaissent le savent. Je vous demande de me croire, je suis innocent."

Puis Yvan Colonna, martèle du point le bord en bois du box des accusés.

« Je suis fatigué, fatigué, fatigué... » avant de s'asseoir la tête dans les mains.

Le président de la cour se met alors à lire les questions auxquelles les juges devront répondre.

Les questions 1 à 32 concernent l’attentat contre la caserne de Pietrosella.

La question 33 est cruciale : est-ce qu’Yvan Colonna a donné volontairement la mort à Claude Erignac ? Question 34 : avec préméditation ? Question 35 : avec des circonstances aggravantes ? Question 36 : une action en relation avec un groupement terroriste ?

Mais le plus important ce soir est que la cour rendra un arrêt motivé. Acquittement ou condamnation, on saura quel a été le cheminement intellectuel des juges, et comment ils se sont forgés leur conviction, dans un texte qui sera prononcé lors de la lecture de l’arrêt.

Cette motivation anticipe sur la loi qui sera votée ces jours-ci par le parlement et qui prévoit une telle disposition.

Le verdict est attentu en fin de journée.

 

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