Médiator : rapport d’étape sur une instruction qui se veut la plus rapide possible. Le procureur de Paris, François Molins, était à la manœuvre hier, accompagné d’Aude Le Guilcher, la vice procureur en charge du dossier. La procédure est complexe. Au départ il y a deux informations judiciaires distinctes ouvertes à Paris :
-une pour tromperie et prise illégale d’intérêt
-une pour blessures et homicides involontaires
Le 5 novembre 2013 décision de joindre les deux informations : les dossiers de 328 victimes sont clos, les expertises judiciaires ont eu lieu et ne sont pas contestées par la défense. 49 cas ont montré un lien avéré entre la prise du Médiator et leur pathologie : valvulopathie ou hypertension pulmonaire, 3 décès ont pu être imputés à la prise de médicament ; 11 sont en cours d’expertise ;
Dans le premier volet « tromperie », 4400 personnes se sont constituées parties civiles. Le nombre de victimes dans le volet homicides et blessures involontaires, parait bien modeste au regard de certains experts qui avaient anticipé entre 1500 et 2300 morts. Il s’explique par la nécessité au pénal d’établir un lien certain de cause à effet entre la prise du médicament et le décès.
En outre durant le procès qui pourrait avoir lieu mi-2015 on jugera un troisième aspect de l’affaire : le conflit d’intérêt. Ainsi 4 membres de l’organisme qui délivrait les autorisations de mise sur le marché sont mis en examen pour avoir reçu des émoluments de Servier au titre de conseil de la société mère ou de ses filiales. « le dossier tromperie va permettre de comprendre ce que les victimes ont enduré et cela impliquera tous les aspects du dossier, y compris le rôle de l’agence du médicament, ou celui d’une parlementaire, Marie Thérèse Hermange et d’un pédiatre, Claude Griselli soupçonné de trafic d’influence.
Pour l’instant , il y a 25 personnes physiques et morales mises en examen dont Jacques Servier et ses deux directeurs Philippe Seta et Christian Bazantay.
Le plus intéressant pour les spécialistes est le rapport d’expertise : 800 pages pour confirmer que Benfluorex est de la famille des amphétamines et qu’il agit sur le poids. Or cette molécule était présente dans le pondéral, l’isoméride et le Médiator. Sauf que dans le cas du Médiator théoriquement utilisé pour soigner le diabète , l’aspect anorexigène a été soigneusement caché. La présence du benfluorex a été occulté par Servier qui l’appelait le S1475. Or le lien entre benfluorex et valvulopathie est désormais par tous les spécialistes qualifié de lien avéré.
Alors il y aura encore des soubresauts judiciaires. Le 7 mars prochain, la chambre de l’instruction donnera son avis sur des demandes de nullité présentées par Servier.
A Nanterre, le 14 mai il y aura une audience relai pour les plaignants qui ont voulu par le biais d’une citation directe obliger la justice à marcher au pas de charge.
Mais le grand procès du Mediator se tiendra à Paris . Et il montrera comment un brillant industriel de la pharmacie a entrainé ceux qu’il est censé soigner vers la souffrance et même à trois reprises au moins, la mort.